L’Action de grâce 2023 est une fête que Noeline Hofmann n’oubliera jamais. Entre deux gorgées de « bière déjeuner » alors qu’elle était dans la maison familiale de Bow Island, en Alberta, elle a reçu un texto qui a changé sa vie : « Zach Bryan vient juste de parler de toi dans sa “story”! »
« J’étais comme “Quoi? Ça doit être un faux compte” », se souvient-elle. « À ce moment-là, j’ai compris que tout allait changer. Mon téléphone vibrait sans arrêt à cause des notifications que je recevais et le nombre de mes abonnés avait doublé chaque fois que je rafraichissais mon fil. Jamais en cent ans je n’aurais imaginé qu’un truc comme ça m’arriverait. »
On pourrait croire que c’est une autre de ces histoires de gloire qui arrive du jour au lendemain grâce aux médias sociaux, mais en réalité, elle jouait dans des honky-tonks et essayait de gagner sa vie « à l’ancienne », comme elle le dit, bien avant que la superstar américaine de la country et gagnant d’un Grammy ne partage un extrait de sa chanson « Purple Gas » à ses abonnés.
« J’ai eu beaucoup de difficulté avec ça, au début », avoue-t-elle. « Je ne voulais pas être juste une autre “célébrité” TikTok. J’ai fait la paix avec tout ça… Je sais que j’ai travaillé fort et mérité toutes les opportunités qui se sont présentées à moi. »
L’ironie dans tout ça, c’est que la jeune femme de 20 ans n’avait à peu près aucune présence sur les réseaux sociaux avant de publier « Purple Gas ». La publication de cette vidéo était essentiellement sa première tentative d’y être plus active. Ce qui la surprend encore plus, avec le recul, c’est qu’elle a écrit se chanson – qui dépasse maintenant les 20 millions de « streams » sur Spotify seulement – la veille de sa publication en ligne, et maintenant, le même Zach Bryan a inclus sa version de la chanson sur son plus récent album, The Great American Bar Scene.
Words & Music s’est entretenu avec Hofmann alors qu’elle profitait d’un rare temps de repos chez elle dans les Southern Badlands de l’Alberta. L’artiste se remet à peine de l’honneur qui lui a été fait de clôturer le Festival de folk d’Edmonton en chantant « Four Strong Winds » de Ian Tyson à la fin d’une performance qu’elle a donné immédiatement après le « set » d’Alison Krauss et Robert Plant. Ce n’était que l’un des nombreux concerts enviables d’un été où elle a également assuré la première partie de Charley Crockett au légendaire Massey Hall de Toronto.
Mais bien avant de se produire sur ces grandes scènes ou même d’apprendre la guitare, Hofmann écrivait inlassablement. « Je ne me souviens pas d’un temps où écrire ne faisait pas partie de qui je suis ou n’était pas au cœur même de qui je suis », confie-t-elle « J’ai suivi des cours de piano quand j’étais petite et je me suis vraiment mise à l’écriture créative quand j’étais au début du secondaire. Je me suis ensuite tournée vers la poésie et quand j’ai commencé à jouer de la guitare, mes poèmes se sont naturellement transformés en chansons. » labor.
Et comme bien des artistes, Hofmann affirme que c’est grâce à un ancien prof de musique qu’elle a choisi de faire carrière en musique. Cet éducateur a encouragé la musicienne alors âgée de 13 ans à participer à une Soirée d’auteurs-compositeurs à Medicine Hat – la ville la plus proche de Bow River, en Alberta. « L’émission passait le samedi soir sur les ondes de la station de télé locale et moi et une amie on y a joué toutes les deux », se souvient-elle. « C’était la première fois que je jouais une chanson originale en direct et j’ai immédiatement eu la piqûre! »
De la vie sur un ranch et l’essence colorée
Ayant grandi dans les Prairies, Hofmann a écouté beaucoup de country classique, mais aussi d’autres genres musicaux comme le rock. Une de ses plus grandes influences est Joni Mitchell, une artiste qui a encore une grande place dans son cœur. Côté salles de spectacles, le trésor de Bow Island – qui se trouve à environ 300 km au sud-est de Calgary – est le Bow Theatre et son célèbre événement Blues at the Bow. Le père de la meilleure amie de Hofmann est le président de cette salle et c’est ainsi qu’elles ont eu droit, en échange de menus travaux, à de nombreuses séances d’écoute quand elles étaient jeunes.
« Si on lavait le plancher ou qu’on faisait d’autres petites taches dans la salle, il nous permettait d’assister au “soundcheck” de tous les groupes qui jouaient là », raconte l’artiste. « C’était une salle 18+, alors on ne pouvait pas assister au spectacle, mais quand t’as 10 et que tu vois passer tous ces artistes, tu finis par te dire “Un jour, moi aussi je vais jouer ici!” »
En vraie cowgirl des Prairies, Hofmann écrit à propos de ce qu’elle connaît : sa jeunesse dans la ruralité albertaine et des histoires au sujet des propriétaires de ranch et des fermiers. « Purple Gas » fait référence à un carburant teinté qui offre un avantage fiscal aux agriculteurs et aux éleveurs qui l’utilisent à des fins agricoles. Ça faisait longtemps qu’elle avait envie d’utiliser ces mots dans une chanson, mais ce n’est que grâce à une expérience formatrice qu’elle a vécue à l’âge de 18 ans – un emploi sur un élevage de bovins dans l’ouest du Manitoba – que les images qui forment la chanson finale ont commencé à prendre forme.
« J’ai écrit la chanson environ un an plus tard », raconte Hofmann. « J’y réfléchissais beaucoup, je repensais à mon patron, tout ce qu’on a vécu ensemble, toutes les expériences de vie que j’ai acquises sur ce ranch. Mon patron et moi on construisait une nouvelle clôture et c’est en repensant à ça que j’ai commencé à écrire. La première phrase qui m’est venue est “I am not the kind of man to blame the dealer on a losing hand”. » [librement : « je ne suis pas le genre à blâmer le croupier quand mes cartes ne sont pas gagnantes »]
Dans la foulée du succès de « Purple Gas », Hofmann a signé un contrat avec la maison de disques La Honda Records qui est également l’étiquette de Colter Wall, The Local Honeys et Bryce Lewis. Un deuxième simple, « Lightning in July (Prairie Fire) », est sorti le 9 août 2024. Elle a écrit ce morceau expressément pour ajouter un morceau de country classique qui casse la baraque à son programme musical avant de partir en tournée avec Charley Crockett. « J’avais envie d’écrire mon propre hymne, une chanson avec un sourire en coin où je me présente avec humour », explique-t-elle.
Son prochain simple sortira d’ici la fin de l’été et un EP devrait paraître à l’automne 2024. Alors que notre conversation tire à sa fin, Hoffman revient sur l’année qui vient de passer et elle partage un conseil qu’elle a appris en travaillant avec Zach Bryan.
« J’ai enregistré “Purple Gas” en direct avec Zach. Il y avait deux micros dans la pièce et on n’a pas fait plus que cinq prises avant qu’il dise “C’était la bonne!” J’ai tendance à être perfectionniste, mais travailler avec un artiste comme Zach m’a appris à lâcher prise et à apprécier la beauté de ce qui est cru et vrai. »
« J’ai vraiment hâte de voir comment mes nouvelles chansons vont faire vibrer les gens. Je suis là pour de bon et je n’ai pas l’intention de changer de cap », conclut-elle.