Si Vincent Vallières s’est imposé au grand public grâce au succès phénoménal de sa chanson « On va s’aimer encore », l’auteur-compositeur-interprète avait déjà en poche quatre albums avant Le Monde tourne fort, paru en septembre 2009, soit Trente arpents (1999), Bordel ambiant (2001), Chacun dans son espace (2003), et Le Repère tranquille (2006).
Ce n’est pourtant qu’en novembre 2010 que la chanson qui changera la dynamique de sa carrière fut envoyée aux stations de radio du Québec, et Vallières y croyait plus ou moins. La réaction du public fut aussi spectaculaire qu’inattendue et propulsa l’album dans les palmarès des ventes pendant plus de 100 semaines !
En studio pour fignoler les chansons de son sixième album, Vincent jette un regard humble et lucide sur ce qu’il qualifie de coup de chance et remercie le ciel que ce succès ne lui soit pas arrivé plus tôt dans sa carrière : « Ce succès-là est arrivé à un moment de ma carrière où j’avais déjà trouvé ma place dans le milieu, j’avais un réseau de fans, je vendais des disques. Mais c’est certain que cette chanson-là a changé la donne au niveau du grand public. C’est sûr que j’aimerais ça répéter un tel succès avec une autre chanson, mais il faut avouer que s’il y a du travail derrière chaque titre, il y a aussi beaucoup de chance dans l’équation. C’est une question de synchronicité entre une chanson et son époque. Peut-être que six mois avant, elle n’aurait pas trouvé sa place dans les médias populaires… Je suis juste très content d’avoir vécu ça et d’avoir encore du plaisir à la chanter soir après soir. Mais disons que maintenant, mon plus grand souci c’est de réussir à garder les gens qui me connaissaient avant “On va s’aimer encore”. »
Plongé en plein processus de création et d’enregistrement durant la période estivale, Vincent Vallières avoue avoir toujours eu besoin de ses collaborateurs de longue date pour l’aider à « arranger » ses nouveaux morceaux. « Je jalouse un peu ceux qui sont capables de tout faire seuls, explique Vincent. Moi, je n’ai pas ces aptitudes-là. Je pense que ma plus grande force, c’est de livrer une matière première qui a de l’allure et j’ai besoin des autres pour peaufiner des idées d’arrangements que j’arrive à expliquer à peu près. Foncièrement, je suis un gars de band. Je travaille avec les mêmes musiciens depuis plusieurs années et je pense qu’ils se sentent aussi dans un band avec moi. Ils ont commencé avec moi au bas de l’échelle et ils ont gravi les échelons avec moi. Pour ça, je leur dois beaucoup. »
Dans un contexte où un public beaucoup plus large qu’auparavant attendra la suite de Le Monde tourne fort, est-ce que l’accouchement des créations s’avère une étape plus difficile? « Ça dépend, hésite Vincent Vallières. Quand j’arrive avec les musiciens, que j’ai une bonne chanson à laquelle je crois et que les paroles sont terminées, c’est plaisant et les arrangements vont souvent être moins pénibles à faire. Sinon, il faut travailler davantage la structure, la tonalité, le tempo… pis des fois, ça marche pas, il manque ci ou ça… Récemment, on a joué au casse-tête pendant trois jours avec une chanson comme ça, dont le titre de travail est “Loin”! Pour finalement en arriver à un résultat très satisfaisant, au point où c’est une des bonnes chansons qu’on a faites pour le projet à date. Mais d’autres fois, quand on s’aperçoit qu’on se bat pour rien, on passe à autre chose. Parce qu’on a un souci d’originalité et d’efficacité aussi, même pour des tounes pop qui ne révolutionneront pas l’histoire de la musique, on s’entend… Mais quand la toune part, on ne veut pas perdre un auditeur avant la fin. »
Depuis ses débuts en 1999, l’industrie de la musique a beaucoup changé. L’évolution technologique l’a bouleversée et son impact sur la création et la diffusion des œuvres musicales est indéniable. Pour Vincent Vallières, il est important d’être ouvert aux nouvelles façons de faire et de savoir s’adapter : « Il faut en voir les avantages et ne pas être rébarbatif aux changements. La grande force du milieu dans lequel on évolue en ce moment c’est d’avoir su démocratiser l’art et faciliter la découverte d’artistes. Ceci dit, dans le micromarché québécois il est clair que l’offre de chansons de qualité est plus grande que la demande. Dans mon cas, c’est un contexte favorable qui m’oblige à me questionner et me dépasser. La rapidité des changements technologiques installe un contexte qui nous met systématiquement en déséquilibre. Mais il y a une chose qui reste vraie : une bonne chanson, c’est une bonne chanson. Je pense que les bons artistes et la bonne musique vont toujours finir par trouver leur chemin. »
Le chemin de Vincent Vallières, lui, malgré la complexité de l’époque, la pression extérieure face au succès, et les angoisses de la création, reste, à son image, d’une simplicité désarmante : « Moi, j’aspire surtout à faire des chansons pour des gens qui ne font pas nécessairement de la musique. Pour monsieur et madame Tout-le-Monde qui finit de travailler, qui embarque dans sa voiture et qui va mettre mon disque pour y trouver une source de réconfort quelconque… » Pour ceux qui aiment encore… une bonne toune ! Un lancement à surveiller très bientôt.